La maitrise des données numériques est un enjeu stratégique pour un pays qui se respecte

22/07/2013 13:15

Hichem Boulahbel Directeur technique, hébergeur Internet

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le 26.05.13 | 12h21

zoom | © El Watan
 

 

Il est  le directeur technique d'un hébergeur lyonnais depuis plus de 13 ans et anime un blog sur les Télécom en Algérie intitulé « guichet des Télécom en Algérie » Il a des projets dans  le monde du Datacenter en Algérie mais, dit-il, avec un ton amer « L'infra Télécom du pays  ne suit pas mes ambitions ; je risque de ne pas aller trop loin »

 

Vous animez un Bloc sur les Télécom en Algérie « Guichet des Télécom en Algérie » Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Mon blog https://dzconnect.webnode.fr/ a été créé dans le but de mettre en place une  plateforme WEB de  réflexions techniques et de contenus informationnels  qui peut contribuer à édifier les bonnes bases  du secteur Télécoms en Algérie.  

A travers ce portail , j'apporte ma modeste contribution pour expliquer et éclairer différents  dossiers  dans le domaines de l'IT et des TIC (ADSL,Datacenter,Cloud ...)  avec des propositions pratiques  afin de trouver les meilleurs solutions  aux problèmes des Télécoms en Algérie .

On y trouve aussi une boite à outils technique qui sert  pour la gestion et l'administration des réseaux sur internet.

En plus, je publie sur ce blog les activités que je mène en Algérie dans les domaines de l'hébergement internet (Salon, publications, émissions radio..).

Vous avez des projets importants en Algérie, notamment dans le monde du Datacenter. Mais, il semble que quelque part, on vous a signifié que vous n’étiez pas le bienvenu dans votre pays. D’abord, c’est quoi le Datacenter et puis, Comment expliquez-vous qu’on refuse votre projet en question ?

Un data center est un terme anglais utilisé par les professionnels de  l'informatique, qui signifie un "centre de données" ou "centre de traitement de données" 

C'est un bâtiment spécialement conçu pour héberger des serveurs, des équipements réseaux et des plateformes Télécoms.

Les données hébergées sont stockées dans des serveurs rangés dans des armoire  (Racks)  et ils doivent être accessibles à tout moment via le réseau et protégées par des systèmes anti intrusion et anti incendie.

On y trouve également, des générateurs de puissances électriques de secours, afin de garantir la continuité de service en cas de coupure dans la fourniture de l'énergie électrique.

En Algérie, l’infrastructure Telecom est exclusivement gérée et exploitée par Algérie Telecom, elle monopolise tout le support physique et  le maillage des liaisons de communication du pays.

L'industrie du Datacenter nécessite une infrastructure réseau de très haut débit , basée sur des systèmes de fibres otiques  redondants  et sécurisés .  

Pour une société comme la notre Netissime.com, pour qu'elle puisse mettre en place un datacenter en Algérie, elle doit gérer son infrastructure télécoms de manière autonome, pour  connecter ces  pops européens avec son datacenter en Algérie.

Les deux câbles sous-marin que le pays exploite en peering avec l'europe sont saturés et il  ne peuvent en aucun cas être utilisés comme support de communication avec nos plateformes en Europe sur de grandes capacités de transit.

La tarification proposé par AT pour une éventuelle location d'une liaison avec l'Europe et qui va ne pas dépasser le 1 Gigabit/seconde est exorbitant, il est de 70 000 Euros / mois pour un transit de 622 Migabits/seconde ! Sachant qu'une liaison de 500 km Paris-Lyon de 10 Gigabits/seconde nous coute 2500 Euros / mois.

Donc nous ne pouvons en aucun cas réaliser un Datacenter en Algérie, si il n'est pas connecté avec notre backbone dans le monde.

Comment comprenez-vous le fait que les Pouvoirs publics soient réticents à l’introduction de la 3G en Algérie ?

La 3 G est une technologie de communication  qui permet d'accéder à Internet en  haut débit, de visionner des vidéos et d'utiliser la visiophonie sans être relié à une ligne fixe classique.

Les Pouvoirs publics sont réticents à l’introduction de la 3G, non pas pour des raisons   politico-sécuritaires ou pour un problème du rachat de Djezzy, mais pour ne pas mettre en péril la societé Alégrie Télécom avec ces 26 000 salariés.                       

Aujourd'hui, Algérie Télécoms est le seul fournisseur de l'ADSL en Algérie avec plus de 1 600 000 abonnés, 75 à 80 %  de ces abonnées ont souscris à un abonnement d'une ligne fixe, juste pour avoir l'ADSL   

Il faut se rappeler, lors du boum de la téléphonie mobile au début des années 2000, lorsqu’une bonne partie des algériens a renoncé à la téléphonie fixe, pour adopter la nouvelle technologie GSM.

Dans cette optique, la 3 G peut faire le même effet si ce n'est pas avec des conséquences plus graves pour AT, les Algériens vont sans doute  plus utiliser  la boucle locale d'Algérie télécoms pour leur ADSL, et adopter  les clés 3 G ou 3 G+  qui vont leurs permettre d'avoir un internet haut débit avec plus de 2Mbs  sans passer par Algérie Télécoms.

L'Etat algérien est plus que jamais consciente de ce défi technologique, il est entre l'enclume et le marteau, laisser l'Algérie comme seul pays en Afrique ou la 3 G est absente ou prendre le risque de voir le plus grand employeur des TIC en Algérie sombrer avec ces 26 000 salariés.

Chahredine Berriah